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En démocratie, c’est rarement une bonne idée pour un gouvernement de refuser de débattre d’un sujet important devant les parlementaires. La Presse

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PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

« [Le passeport vaccinal] est une mesure sanitaire importante qui mérite d’être discutée en août à l’Assemblée nationale, dont les débats ordinaires ne reprennent pas avant la mi-septembre », écrit notre éditorialiste.

VINCENT BROUSSEAU-POULIOTLA PRESSE

Publié le 16 août 2021 à 5h00

Le gouvernement Legault vient pourtant de rejeter les appels des partis de l’opposition à discuter, lors de débats à l’Assemblée nationale, de l’implantation du passeport vaccinal. « Il faut aussi être prudent, ne pas faire exprès pour donner à des opposants des tribunes qui pourraient influencer la population en utilisant des arguments non fondés », a dit le premier ministre François Legault mercredi. Le lendemain, plutôt que de s’amender, il a expliqué ne pas vouloir donner le micro à des complotistes qui parleraient de puce dans le bras.

C’est une mauvaise excuse. Pas un argument sérieux.

Oui, il est possible d’être à la fois en faveur des mesures sanitaires et des débats parlementaires. C’est le contraire qui serait préoccupant.

À compter du 1er septembre, Québec sera la première province canadienne à imposer un passeport vaccinal. Seulement pour les bars, les gyms, les restos et les festivals, des services non essentiels. On applaudit cette décision. Non, un tel passeport vaccinal n’est pas discriminatoire ni injuste alors qu’on traverse une quatrième vague. C’est une mesure sanitaire logique et raisonnable, basée sur les risques sanitaires plus élevés que représentent les personnes non vaccinées.

Là où le bât blesse, c’est que le gouvernement Legault ne veut pas discuter de ses modalités d’application à l’Assemblée nationale.

En France, les députés ont adopté une nouvelle loi sur le passeport vaccinal. Ce n’est pas nécessaire d’en faire autant. La Loi sur la santé publique du Québec permet parfaitement au gouvernement d’instaurer un passeport vaccinal dans un contexte d’état d’urgence sanitaire. Une loi prendrait des semaines, voire des mois à adopter. On vient d’entrer dans la quatrième vague. Il faut agir rapidement.

Une solution simple et idéale : tenir un débat sur le passeport vaccinal en commission parlementaire sur la santé. Avec beaucoup de bonne foi, ça pourrait même se faire cette semaine.

On dit tenir un débat, mais ça ne serait pas vraiment un débat : les quatre partis reconnus officiellement à l’Assemblée nationale sont tous en faveur du passeport vaccinal dans le contexte actuel. Ils suggèrent des modifications mineures. Et veulent surtout entendre des experts et des groupes de la société civile. Le ministre de la Santé, Christian Dubé, fait vraisemblablement cet exercice en privé de toute façon.

Au final, c’est le gouvernement Legault qui va décider, par décret, des modalités du passeport vaccinal. Tout le monde s’entend là-dessus. La commission parlementaire lui ferait des recommandations.

On a beau chercher, on ne trouve pas de bonne raison pourquoi le gouvernement devrait refuser une consultation rapide (ex. : un à trois jours) en commission parlementaire. Les quatre partis reconnus officiellement à l’Assemblée nationale sont capables de s’entendre sur une liste d’experts et de groupes de la société civile, comme ça se fait régulièrement.

Répétons-le : sur le fond, on est fortement en faveur du passeport vaccinal. Sur la forme, il faut reconnaître qu’il s’agit d’une mesure sanitaire importante. Qui mérite d’être discutée en août à l’Assemblée nationale, dont les débats ordinaires ne reprennent pas avant la mi-septembre.

Autre enjeu à discuter à l’Assemblée nationale (celui-ci peut attendre à la mi-septembre) : l’état d’urgence sanitaire. Depuis le début de la pandémie, Québec décrète l’état d’urgence sanitaire par décret gouvernemental tous les 10 jours. La Loi sur la santé publique prévoit que l’état d’urgence sanitaire peut être renouvelé par décret gouvernemental tous les 10 jours ou par l’Assemblée nationale (un vote des députés) tous les 30 jours. Soyons clairs : Québec a parfaitement le droit de le renouveler par décret tous les 10 jours. Toutes les mesures sanitaires ainsi décrétées sont valides sur la forme.

Après 18 mois de pandémie, le gouvernement Legault devrait faire davantage que le strict minimum requis par la loi. À partir de septembre, il serait plus sage de faire renouveler l’état d’urgence sanitaire par l’Assemblée nationale tous les 30 jours.

Les débats parlementaires sont essentiels en tout temps. Ils sont au cœur de notre démocratie. Et celle-ci n’est pas un concours de vitesse ou d’efficacité.

Voilà pourquoi il faut discuter immédiatement du futur passeport vaccinal à l’Assemblée nationale.

SOURCE: LA PRESSE