Des documents montrent que l’armée surveillait déjà la COVID-19 en janvier 2020 - RADIO-CANADA
CBC
Des documents montrent que l’armée canadienne a commencé à surveiller la progression de la COVID-19 et à se préparer à y répondre dès janvier 2020. Des experts se demandent maintenant si cet avantage a été gaspillé lorsqu’est venu le temps d’en prévoir l’impact sur les troupes et le public.
Les documents, obtenus par CBC News, montrent que la première réunion de ce qui deviendrait plus tard l’opération LASER – la réponse des Forces armées canadiennes (FAC) à une situation de pandémie – a eu lieu le 23 janvier 2020, soit près de deux mois avant que l’opération ne soit demandée par le gouvernement fédéral.
Les documents, partiellement caviardés et obtenus par l’entremise d’une demande d’accès à l’information, montrent que l’armée s’est intéressée à la désinformation à peu près au même moment. Elle a débattu plus tard de la transformation potentielle du nouveau coronavirus en arme biologique.
Ces documents révèlent aussi que des officiers des renseignements de l’armée canadienne ont régulièrement rencontré leurs homologues alliés pour discuter de la progression de la pandémie.
Une menace sous-estimée
Des centaines de pages de comptes-rendus et d’évaluations du Commandement du renseignement des Forces canadiennes (COMRENSFC) et du Groupe des Services de santé des Forces canadiennes (GSSFC) montrent à quel point la menace était mal comprise et que les signes avant-coureurs doivent être pris plus au sérieux, selon Wesley Wark, historien à l’Université d’Ottawa et expert en renseignements. Il a sévèrement critiqué la réponse du gouvernement fédéral face à la pandémie.
ASPC, soit qu’ils ont été incapables de diffuser des avertissements précoces à propos de la COVID-19 et qu’ils ont largement sous-estimé la menace qu’elle représentait pour le Canada », »text »: »La conclusion qu’il faut tirer de ces documents, à mon avis, c’est que le ministère de la Défense nationale […] avait le même problème que l’ASPC, soit qu’ils ont été incapables de diffuser des avertissements précoces à propos de la COVID-19 et qu’ils ont largement sous-estimé la menace qu’elle représentait pour le Canada »}} »>La conclusion qu’il faut tirer de ces documents, à mon avis, c’est que le ministère de la Défense nationale […] avait le même problème que l’ASPCAgence de la santé publique du Canada, soit qu’ils ont été incapables de diffuser des avertissements précoces à propos de la COVID-19 et qu’ils ont largement sous-estimé la menace qu’elle représentait pour le Canada
, a dit le professeur Wark en entrevue avec CBC News.
La branche du renseignement médical de l’armée a le mandat de surveiller la situation sanitaire dans les endroits où des troupes sont déployées. Dans le passé, elle a habituellement partagé ses informations avec l’ASPCAgence de la santé publique du Canada.
L’un des rapports, écrit le 24 mars 2020, examine un 000morts », »text »: »scénario pessimiste plausible de 250000morts »}} »>scénario pessimiste plausible de 250 000 morts
au Canada sans restriction comme les masques ou la distanciation physique.
Selon le professeur Wark, il est surprenant que les liens avec des agences de renseignements alliées n’aient pas mené à des avertissements plus explicites ou exprimant un plus grand sentiment d’urgence.
Pendant plus de 70 ans, le Canada et certains de ses plus proches alliés – les États-Unis, le Royaume-Uni, et l’Australie – ont échangé des renseignements médicaux.
Ces relations mènent régulièrement à la production de données et de connaissances détaillées – la plupart provenant de l’armée américaine – sur des menaces sanitaires émergentes à travers le monde, selon le Dr Jonathan Clemente, un médecin et expert en histoire du renseignement médical de Charlotte, en Caroline du Nord.
Selon lui, il est fort probable que le National Center for Medical Intelligence (NCMI) de Fort Detrick, au Maryland, ait tiré la sonnette d’alarme et qu’il ait produit des évaluations complètes de la progression du virus.
Des informations ignorées
L’unité du renseignement médical de l’armée canadienne, dont la mission principale est de s’assurer de la bonne santé des troupes sur le terrain, a commencé à produire des rapports sur le virus en janvier 2020, suivis de mises à jour le mois suivant.
On ne trouve aucune trace de ces rapports – ni des analyses distinctes et plus détaillées des services de santé des FACForces armées canadiennes – dans les évaluations de l’ASPCAgence de la santé publique du Canada, qui a initialement jugé que la COVID-19 présentait un risque faible
.
Des décideurs du gouvernement fédéral se fiaient aux évaluations de l’ASPCAgence de la santé publique du Canada pour les guider sur les mesures à prendre, comme la fermeture des frontières ou la quarantaine.
Les documents montrent qu’à un certain moment, un partenaire d’un service de renseignements allié a demandé des informations spécifiques liées au coronavirus au Canada. Les services de renseignements canadiens ont fait suivre la demande à l’ASPCAgence de la santé publique du Canada, qui n’y a pas donné suite avant un délai de deux semaines.
Selon le professeur Wark, tout cela démontre à quel point le gouvernement fédéral n’était pas prêt à réagir rapidement pendant la crise.
À son avis, les documents obtenus par CBC News prouvent que le besoin de meilleures analyses indépendantes et de spécialisation plus poussée au sein de la communauté des renseignements militaires, en particulier lorsqu’il est question d’enjeux de santé.
Je pense que c’est en partie parce qu’ils n’avaient pas toute l’information à leur disposition ou qu’ils ne l’ont pas utilisé
, a laissé tomber l’historien.
Franchement, je pense qu’ils ont fait preuve d’un manque d’imagination
Un porte-parole du ministre de la Défense, Harjit Sajjan, a dit que les services de santé des FACForces armées canadiennes ont un rôle important à jouer pour prévoir FAC et du ministère de la Défense », »text »: »les éclosions de maladies infectieuses, les risques pour la santé, et les risques environnementaux qui pourraient avoir un impact sur les opérations des FAC et du ministère de la Défense »}} »>les éclosions de maladies infectieuses, les risques pour la santé, et les risques environnementaux qui pourraient avoir un impact sur les opérations des FACForces armées canadiennes et du ministère de la Défense
.
Selon Daniel Minden, les informations sont partagées à travers le gouvernement.
Il a ajouté que la dernière politique de défense, qui date de 2017, s’engage à COMRENSFC de fournir du soutien informationnel plus sophistiqué aux opérations, y compris au moyen de prévisions améliorées », »text »: »renforcer la capacité du COMRENSFC de fournir du soutien informationnel plus sophistiqué aux opérations, y compris au moyen de prévisions améliorées »}} »>renforcer la capacité du COMRENSFCCommandement du renseignement des Forces canadiennes de fournir du soutien informationnel plus sophistiqué aux opérations, y compris au moyen de prévisions améliorées
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Communications difficiles
Malgré ce que dit M. Minden, les documents obtenus par CBC News semblent montrer que les diverses agences fédérales semblaient agir en silos dans les premiers jours de la pandémie.
Par exemple, le premier avertissement que l’armée a reçu à propos de la COVID-19 venait de ProMED, un programme de l’International Society for Infectious Diseases (ISID) – et non du Réseau mondial d’information en santé publique (RMISP), mis sur pied par le gouvernement fédéral.
Honnêtement, ça me déçoit
, a déclaré le Dr Ron St. John, un ancien directeur général de l’ASPCAgence de la santé publique du Canada.
L’avertissement de ProMED à propos d’une épidémie liée à une maladie infectieuse à Wuhan, en Chine, a été diffusé presque un jour avant que le RMISPRéseau mondial d’information en santé publique ne diffuse le sien au sein du gouvernement fédéral, le 31 décembre 2019.
Selon le Dr St. John, il est troublant que l’armée ait eu à se fier à une agence externe puisqu’il y a une dizaine d’années, il y a avait un niveau élevé de coopération entre les autorités sanitaires et les services de la défense.
J’aurais pensé qu’une épidémie liée à une maladie infectieuse serait le genre d’information qui soit partagé à travers de multiples canaux de communication au sein du gouvernement du Canada.
La théorie de la fuite d’un laboratoire examinée
Les documents montrent qu’il y a eu des débats au sein de l’armée au printemps 2020 à propos de la théorie selon laquelle la COVID-19 aurait été créée en laboratoire. Les rapports ne l’ont pas entièrement écartée.
Il existe de multiples exemples de rejets accidentels d’organismes infectieux depuis des laboratoires de recherche, y compris ceux qui mènent des recherches dans le cadre d’un confinement biologique de haut niveau
, peut-on lire dans une analyse du 4 mai 2020.
Des analystes se sont aussi penchés sur la possibilité que des variants puissent être transformés en armes biologiques.
Depuis l’émergence du virus SARS-CoV-2 dans la population et la pandémie de COVID-19 qui a suivi, des préoccupations ont été soulevées quant à son utilisation potentielle comme arme biologique
, indique un rapport daté du 11 juin 2020.
Le Dr St. John dit qu’il s’agit du genre de rapport que les autorités sanitaires et de la sécurité publique avaient régulièrement dans les années qui ont suivi l’attaque du 11 septembre 2001. Selon lui, il est troublant que le ministère de la Défense soit le seul à se pencher sérieusement sur la question.
Je pense que ce doit être examiné sérieusement
, a-t-il dit. Il est possible de modifier les gènes des virus pour les rendre plus mortels ou plus contagieux, mais ça prendrait un laboratoire très sophistiqué.
Le milieu de la défense est divisé sur la question puisque le virus SARS-CoV-2 n’a pas beaucoup des attributs nécessaires pour qu’il soit utile dans un conflit armé. Une telle arme serait difficile à produire et risquerait d’infecter les deux camps.
Avec les informations de Murray Brewster