23 DÉCEMBRE 2020
Le déploiement de millions de tests inutilisés à des personnes asymptomatiques travaillant dans des environnements à contacts élevés, tels que les soins de santé et les soins aux personnes âgées, pourrait sauver des vies parmi les personnes les plus exposées à la COVID-19.
Les tests et le dépistage de la COVID-19 au Canada ont jusqu’à présent été globalement médiocres. De grandes promesses ont toujours conduit à des résultats mitigés, de sorte qu’à ce jour, le Canada n’a effectué que la moitié des tests COVID-19 par habitant effectués au Royaume-Uni ou aux États-Unis. Beaucoup de gens ont été étonnés le mois dernier lorsque la nouvelle a été annoncée que le Québec avait stocké près de 1,3 million de tests rapides de COVID-19 qui ramassaient la poussière, alors même que le nombre de cas et de décès augmentait régulièrement. En fait, partout au Canada, à la mi-novembre, environ 3,8 millions de tests inutilisés étaient entreposés pendant que les bureaucrates débattaient de la façon de les utiliser.
Ces mêmes bureaucrates pourraient signaler que les réglementations fédérales, exigeant que les tests ne soient utilisés que sur les patients symptomatiques, laissent un nombre probablement beaucoup plus grand de porteurs asymptomatiques, mais toujours contagieux, propager le virus aux plus vulnérables. Ces bureaucrates pourraient également blâmer les retards de Santé Canada dans l’approbation, des tests, aux traitements, en passant par les vaccins.
Pendant ce temps, les soignants craignent d’infecter involontairement leurs patients à risque. Le PDG de SafeCare BC a déclaré que «le personnel vit actuellement dans la peur de pouvoir apporter la COVID-19 dans la maison de soins, ou à la maison dans leur famille. C’est un énorme fardeau pour la santé mentale que nos travailleurs de la santé ne devraient pas avoir à supporter.»
Cette lenteur bureaucratique est emblématique de la réponse du gouvernement face à la COVID-19. Plus précisément, la solution unique qui ne s’ajuste pas aux nouvelles données et aux nouveaux faits sur le terrain. Après tout, il était peut-être logique de stocker des tests au début de la pandémie quand il y avait une pénurie, mais aujourd’hui, ces millions de tests accumulant la poussière pourraient être utilisés pour éviter précisément le type d’épidémie le plus meurtrier, à savoir celles qui se produisent dans les résidences de personnes âgées et environnements de soins similaires.
Nous avons vu un problème similaire avec les confinements, où les premières décisions prises avec des informations imparfaites étaient figées dans le roc par l’inertie bureaucratique. Par exemple, si nous avions su à quel point la COVID-19 discrimine fortement selon l’âge et la morbidité – l’âge moyen d’un décès excédentaire de COVID-19 au Canada étant supérieur à 85 ans –, alors nous aurions pu concentrer beaucoup plus de ressources sur les centres pour personnes âgées et la prévention de la transmission dans les hôpitaux, plutôt que d’envoyer des enfants d’âge préscolaire à la maison ou de payer des travailleurs de la construction pour qu’ils restent à la maison. Avec une telle intervention «ciblée» plus intelligente, nous aurions pu sauver beaucoup plus de vies avec beaucoup moins de tragédies sociales et économiques, allant du chômage de masse et de la faillite à une épidémie de surdose de drogue, de dépression et même de suicide.
Au lieu d’adopter des règles rigides qui dissipent des ressources limitées, nous devons faire une évaluation minutieuse des endroits où les restrictions ont le plus d’impact et où les tests rapides peuvent être mieux utilisés pour repousser les épidémies. Cela pourrait signifier, par exemple, un effort concentré pour fournir des tests rapides abondants, sur un calendrier régulier et indépendamment des symptômes, aux soignants et aux agents de santé interagissant avec les personnes âgées ou les plus à risque.
Ces tests de masse ciblés pourraient être combinés à des tests sur des patients âgés ou vulnérables asymptomatiques, pour éviter la transmission entre pairs. En déployant ces tests de manière ciblée, ils pourraient faire le plus de bien le plus tôt possible, plutôt que de continuer à ramasser la poussière en attendant leur utilisation.
Nous voulons tous des réponses gouvernementales flexibles et adaptées aux réalités changeantes. Avec un besoin si répandu partout au Canada, nous ne pouvons plus perdre de temps avec des approches dispersées ou des données désuètes. Des tests de masse ciblés sur les personnes occupant des positions sensibles et interagissant avec les personnes vulnérables peuvent parer aux épidémies les plus meurtrières avant qu’elles ne deviennent incontrôlables.
Peter St. Onge est chercheur associé senior à l’IEDM. Il signe ce texte à titre personnel.