Alexandre Robillard
Correspondant parlementaire
La Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) doit resserrer ses pratiques pour éviter les risques de conflits d’intérêts, de fraude et de corruption dans ses investissements, indique un rapport de la vérificatrice générale du Québec, Guylaine Leclerc.
Le document déposé mercredi met en lumière plusieurs pratiques insuffisantes au sein de l’institution et deux de ses filiales, Ivanhoé Cambridge et Otéra Capital.
« Il n’y a pas de politique relativement au blanchiment d’argent, ou certaines politiques ou directives ne sont pas appliquées telles qu’elles sont décrites », a déclaré en conférence de presse Mme Leclerc.
Risques de fraude
Les vérificateurs relèvent notamment un manque de précisions sur les renseignements qui permettent de contrôler les antécédents des partenaires potentiels de la CDPQ, comme leur date de naissance ou leur lieu de résidence, ce qui peut causer des erreurs sur la personne.
Ivanhoé Cambridge, de son côté, ne faisait pas de vérification systématique sur les vendeurs des propriétés immobilières dont elle a fait l’acquisition. « Une organisation ou un individu malveillant peuvent se servir d’une transaction immobilière pour commettre une fraude », soulignent les vérificateurs dans le rapport.
Pour six investissements de la CDPQ et un investissement d’Ivanhoé, les vérificateurs ont noté qu’un risque pour leur réputation avait été relevé. Ces informations n’ont pas été transmises aux comités chargés d’approuver les transactions.
Le rapport souligne notamment un cas où des « allégations préoccupantes » sont restées sans suite.
Un dirigeant en conflit d’intérêts
L’équipe de Mme Leclerc met aussi en évidence des faiblesses dans la gestion des conflits d’intérêts, pointant le cas précis d’un investissement de la CDPQ impliquant un de ses dirigeants.
Selon les faits exposés dans le rapport, ce dirigeant a tardé à divulguer un conflit d’intérêts, le faisant trois semaines après avoir participé aux premiers échanges dans ce dossier. Il avait « un lien étroit avec un haut dirigeant de la société ciblée par cet investissement », affirme le rapport, en précisant que cette personne aurait dû être exclue.
« C’est une lacune, a indiqué Guylaine Leclerc. Donc, c’est une activité qui n’aurait pas dû avoir lieu, spécialement parce que c’est un gestionnaire. Un gestionnaire se doit d’être au courant. »
Entre autres recommandations, la vérificatrice suggère à la CDPQ de resserrer ses mesures de détection des conflits d’intérêts, de la fraude et de la corruption. L’institution a soutenu qu’elle avait déjà commencé à mettre en œuvre les recommandations.
Télé-santé
Par ailleurs, le plus récent rapport des équipes de Mme Leclerc a constaté que le ministère de la Santé et des Services sociaux ne disposait pas des outils nécessaires quand les soins médicaux à distance ont été déployés en vertu de l’état d’urgence sanitaire déclenché au début de la pandémie, en mars 2020.
Le manque d’encadrement a fait en sorte que des médecins ont effectué jusqu’à 90 % de leurs consultations à distance. Les logiciels de visioconférence ont été peu utilisés. Le téléphone a été privilégié dans 99 % des téléconsultations, de mars 2020 à septembre 2021.
Il a fallu attendre avril 2021 pour que le ministère de la Santé précise quelles consultations pouvaient être faites à distance et dans quels cas un examen visuel et physique était nécessaire, a déploré Mme Leclerc.
« Je ne suis pas en mesure de vous dire que la santé des Québécois a été menacée, a-t-elle dit. On n’est pas en mesure de dire oui ou non, mais c’est certain qu’il fallait un encadrement. »
SOURCE: LE DEVOIR