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Patrick Bellerose | Bureau parlementaire
| Publié le – Mis à jour
Le gouvernement Legault a systématiquement utilisé des employés payés par l’État pour préparer sa prochaine campagne électorale, révèle la commissaire à l’éthique dans un rapport déposé jeudi.
Il s’agit pourtant d’une pratique que la CAQ dénonçait avec véhémence dans l’opposition, lorsque le PQ avait utilisé un stratagème similaire.
En novembre dernier, la commissaire avait entrepris une enquête sur l’utilisation de fonds publics par le cabinet du whip Éric Lefebvre après qu’un courriel provenant d’un membre de son personnel fut tombé entre les mains de l’opposition.
Ainsi, le 11 juin 2021, tout le personnel des bureaux de circonscription de l’aile parlementaire caquiste a été convoqué pour assister, entre 10h30 et 11h30, à une formation en visioconférence en vue de la prochaine campagne électorale.
La présentation, faite par la directrice générale de la CAQ, Brigitte Legault, se divise en quatre parties:
– «Incontournable»: objectifs électoraux en termes d’amis Facebook, membres à recruter, financement à recueillir, etc.
– «À la rencontre de vos électeurs»: avec les sections «travailler votre comté», «processus des candidatures», etc.
– «Nouveaux outils»: sur les plateformes du parti.
– «Calendrier des événements à venir»: qui inclut le congrès de la relève de la CAQ, le Conseil général des membres et le 10e anniversaire du parti.
– «L’ensemble des témoins n’a pas cherché à dépeindre cette formation comme autre chose qu’une présentation visant à préparer la campagne électorale», écrit la commissaire.
Deuxième formation
Le 10 novembre 2021, une nouvelle formation était offerte à «l’ensemble des membres du personnel des bureaux de circonscription», toujours pendant les heures de bureau.
Le directeur de la planification et des achats médias pour la précampagne et la campagne CAQ 2022 y donnera une formation sur l’achat de placement publicitaire. On rappellera d’ailleurs aux participants d’utiliser Coaliste, la plateforme du parti, pour les demandes de placement média.
Le cabinet du whip en chef, visé par l’enquête de la commissaire, avait pourtant affirmé, après les premières révélations, que la formation visait à faire la distinction entre les publicités partisanes ou non partisanes.
Pas de sanction
Malgré ces observations, la commissaire a choisi de ne pas imposer de sanction au whip en chef du gouvernement, Éric Lefebvre, étant donné sa collaboration «exemplaire» lors de l’enquête.
«Le whip en chef s’est aussi engagé à prendre les mesures appropriées afin de récupérer le temps consacré par les membres de son personnel à cette formation, afin que ces derniers ne soient pas rémunérés par des fonds publics, en l’occurrence la masse salariale mise à sa disposition dans l’exercice de sa charge», écrit la commissaire.
Éric Lefebvre a réagi dans une courte déclaration par courriel, jeudi. «La commissaire ne m’a imposé aucune sanction à la suite d’une enquête approfondie à laquelle j’ai pleinement collaboré. La commissaire parle même d’une collaboration exemplaire dans son rapport», affirme-t-il.
«J’ai toujours accordé une grande importance à l’éthique et à la transparence, et, d’ailleurs, j’ai rapidement entrepris des démarches visant à sensibiliser l’ensemble de mon personnel et du personnel des bureaux de circonscription», ajoute-t-il.
Des «centaines d’heures»
Toutefois, la commissaire s’inquiète de voir les employés de l’aile parlementaire de la CAQ aller de l’avant avec ce qui est décrit dans les formations en vue de la campagne électorale.
«Il est évident que cette tâche, dont les différentes étapes ont été décrites précédemment dans la section portant sur le contenu de la formation, nécessitera plusieurs heures de travail pour la ou les personnes impliquées dans sa réalisation au sein de chaque bureau de circonscription. Considérant que la demande concerne l’ensemble des bureaux de circonscription du groupe parlementaire formant le gouvernement, plusieurs centaines d’heures pourraient être consacrées à cette fin», écrit-elle.
De plus, elle invite tous les élus de l’Assemblée nationale à suivre une formation sur le Code d’éthique auquel ils sont censés adhérer. Seulement 29 des 125 élus ont suivi la formation offerte.
Pourtant, rappelle la commissaire, les députés à Québec ont récemment adopté une loi qui oblige les élus municipaux à suivre une formation sur l’éthique et la déontologie.
– Avec Vincent Larin, Agence QMI